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Article du 19 septembre 2002 (L’Express).

TERRORISME

La menace nucléaire

Ben Laden est-il en possession d'une valise nucléaire provenant des arsenaux de l'ex-URSS ? Plusieurs experts l'assurent. Aux Etats-Unis le risque est pris au sérieux

valise nucléaire mini-bombe atomique, le MK 47

Le 11 septembre 2001, à 11 heures du matin, George W. Bush or­donne, de la ligne sé­curisée de son avion, de pla­cer le dispositif nucléaire américain au niveau d'alerte Defcon 2. Il sait qu'il s'agit là de l'ultime étape avant l'apo­calypse nucléaire. Une heure plus tard, le président améri­cain donne son feu vert à l'opération Jeep (Joint Emergency Evacuation Plan). C'est la première fois qu'est activé ce dispositif conçu dans les an­nées 1950 par le président Eisenhower, afin de préserver l'administration d'une attaque soviétique sur Washington. Un nouveau conflit vient de com­mencer. Contre un ennemi in­visible. Hier garant de l'« équi­libre de la terreur », le feu nucléaire est désormais une arme tactique, capable de frap­per partout, sans préavis (1). Car, lorsque George Bush dé­clenche le Defcon 2, la CIA est convaincue qu'Oussama ben Laden, gourou d'Al-Qaeda, possède une charge atomique. D'où la panique qui règne alors à Washington. Des centaines de fonctionnaires convoqués à la hâte s'entas­sent dans cinq hélicoptères qui mettent aussitôt le cap sur l'abri antiatomique de Mount Weather (Virginie). Situé à 70 kilomètres de la capitale, il a été creusé il y a plusieurs an­nées au cœur de la montagne pour abriter un gouvernement d'urgence, en cas de conflit nu­cléaire.

Quelques semaines plus tard, dans le chaudron afghan, agents de la CIA et forces spé­ciales traquent fébrilement le moindre indice permettant de déchiffrer l'énigme nucléaire d'Al-Qaeda. D'autant qu'à Langley, siège de la centrale, on peaufinait, en décem­bre 2001, un rapport sur l'aventure nucléaire des isla­mistes. La première pièce du dossier relate la tentative sup­posée de Ben Laden d'ache­ter au Soudan,dès 1993, de l'uranium dérobé en Afrique du Sud. Suivent des dizaines de récits retraçant les efforts déployés pour acquérir, par l'entremise de clans mafieux, charges nucléaires et matières fissiles à Peshawar (Pakistan), Moscou, Vienne, Budapest, Paris, Marbella, la Côte d'Azur et jusqu'aux confins du Kazakhstan et de la Tchétchénie.

ben laden

Reste la révélation la plus explosive : la détention par Ben Laden et les siens de va­lises nucléaires en provenance des arsenaux de l'ex-URSS. Bref retour en arrière : au début des années 1960, les Etats-Unis développent dans le se­cret le plus absolu une mini-bombe atomique, le MK 47, qui tient dans un sac à dos et peut être manipulée par un seul opérateur. Une décennie après, les Soviétiques fabri­quent à leur tour un clone de cette « bombe naine ». Chaque exemplaire est capable de dé­truire le cœur d'une grande ville - le site du Capitole, à Washington, ou la place de la Concorde, à Paris.

Le KGB commandera une centaine de ces « valises » aux experts d'une usine clandes­tine dans le sud de l'Oural. Requête confirmée à Moscou par le scientifique russe Alexeï Jablokov, familier de l'artifi­cier en chef. Seule une dizaine de pontes des services secrets connaissait l'existence des va­lises fatales, qui sommeille­ront dans leur planque pen­dant près de trente ans. A en croire Washington, 200 autres unités seront four­mes au 12e directorat de l'Ar­mée rouge. Selon son chef ac­tuel, le général Igor Volynkine, toutes furent dé­truites entre 1995 et 1997. Aucune trace, en revanche, de la première livraison. En 1997, Alexandre Lebed, pré­cédemment conseiller de Bo­ris Eltsine, révèle la dispari­tion d'une centaine de valises nucléaires. « Je ne sais pas où elles sont stockées, si elles ont été volées, perdues ou ven­dues », confesse-t-il à la télé­vision américaine avec une candeur déroutante. Le flam­boyant général, en butte à l'hostilité du SVR (service du renseignement extérieur), fut limogé en octobre 1996, avant d'avoir percé le mystère. Ce n'est qu'en 1998 que les au­torités moscovites nommeront une commission d'enquête dont les travaux demeurent, pour l'heure, confidentiels.

Après l'éclatement de l'URSS, la mafia tchétchène joue un rôle essentiel dans la nouvelle hiérarchie des pou­voirs illégaux. Ses chefs dé­bauchent à cette époque plu­sieurs anciens du KGB, écartés après le coup d'Etat avorté d'août 1991. Ces re­crues avaient saisi d'énormes stocks d'armes et de munitions abandonnées dans les répu­bliques d'Asie centrale. « Ben Laden a acheté des valises nu­cléaires en Tchétchénie pour 30 millions de dollars », sou­tient à Washington Yossef Bodansky, directeur du Centre sur le terrorisme au Congrès et auteur d'un essai sur Ben Laden, l'homme qui a déclaré la guerre aux Etats-Unis. Costume gris, visage grave, le conseiller des congressmen martèle son credo : « Des informations très fiables attestent que Ben Laden dispose d'au moins trois valises atomiques et d'in­génieurs capables de les ac­tionner. » Selon une source pakistanaise, il n'est pas im­possible que l'une d'elles ait été introduite aux Etats-Unis « à l'automne 2001 ».

Journaliste au Pakistan, Hamid Mir a rencontré Ben La­den dans son repaire afghan en novembre 2001. Le chef ter­roriste lui avoue être en pos­session d'un de ces colis piégés.
« Après l'entretien, raconte-t-il, j'ai demandé à Ayman Zawahiri, bras droit de Ben La­den, comment il s'était procuré l'engin. Voici sa réponse :
"Monsieur Mir, avec 30 mil­lions de dollars, vous pourriez, vous aussi, acheter trois valises en Asie centrale." Confirmation de Robert Baer, l'un des meilleurs agents de la CIA, actif dans cette ré­gion jusqu'en 1997 : « Tout était à vendre, là-bas, absolu­ment tout ! Pour un général russe qui devait nourrir des hommes privés de solde de­puis des mois, quelle diffé­rence entre un missile et une arme nucléaire tactique ? »
Que faire, alors ? Pour Baer, une seule réponse : pénétrer les cellules d'Àl-Qaeda, à tous les échelons.

Hesi Carmel

(1) Voir La Menace nucléaire, un documentaire de Hesi Carmel, Jean-Marc Gonin et Richard Puech, produit par Capa TV, qui sera diffusé jeudi 26 septembre, à 22 h 30. sur France 3.