mes "frères" assassins
mes "frères" assassins, recto mes "frères" assassins, verso

"mes frères assassins" a été publié par Mohamed Sifaoui en 2000 aux éditions le cherche midi.
ISBN 2.74910.086.0

Extrait :
Je suis musulman, d'origine algérienne et journaliste de profession. Avant que le monde occidental ne découvre l'horreur un certain 11 septembre 2001 J'avais, à l'instar de mes compatriotes algériens, vécu pendant dix années les affres du terrorisme islamiste. J'ai perdu - comme beaucoup de mes compatriotes - des amis, des membres de ma famille, autant d'êtres chers. Cette blessure indé­lébile ne s'effacera jamais.
Ce drame, nous l'avons vécu, en Algérie, sans la compassion de l'opinion internationale. Je le dis sans ambages : le monde occidental ne s'est soucié réelle­ment du danger terroriste que lorsque celui-ci a frappé à ses portes. Je n'ai jamais ressenti la solidarité affichée, par exemple, en France en direction des Américains lorsque ces derniers ont été ébranlés par les attentats de New York et Washington. Ce jour-là, j'ai compris une chose très importante : quoi qu'on dise, quoi qu'on rabâche comme discours, en Occident, la vie d'un Algérien ne vaut pas celle d'un Américain comme la vie d'un Rwandais ne vaut pas celle d'un Français.
Ces vérités ne m'ont toutefois pas empêché de continuer mon combat contre l'islamisme, par crainte de voir ce phénomène atteindre la France et menacer la sécurité de ce pays qui m'avait accueilli en son sein et qui était devenu également le mien. Bien que certains courants ici, en France, continuent de se voiler la face, cherchant qui est islamiste « modéré » et qui est inté­griste « radical », dédouanant au passage - très souvent -les crimes commis par ce « fascisme » aux quatre coins du globe et notamment en Algérie, je n'ai jamais baissé les bras, poursuivant mon action - qui est aussi celle de millions d'autres personnes à travers le monde - pour dénoncer l'islamisme en tant qu'idéologie nourricière de ce terrorisme abject qui, des Philippines à la Tchétchénie et du Proche-Orient à la corne de l'Afrique, menace des populations entières. Les attentats à la bombe se poursuivent à un rythme infernal.
Pour ceux qui ne s'imaginent peut-être pas ce que pourrait représenter comme traumatisme et comme désolation un attentat à la bombe, je raconterai celui auquel j'ai personnellement échappé :
Un après-midi paisible de février 1996, Alger baignait dans un soleil printanier. J'étais, avec d'autres collègues, dans une salle de rédaction en train de faire mon métier de journaliste. L'ambiance était sereine. Nous étions en plein mois de ramadan. J'avais hâte de terminer mon article pour quitter mon lieu de travail et aller faire un tour au marché. Un collègue, Hocine, est venu me faire sortir de la salle de rédaction pour me raconter une plaisanterie. Celle-ci allait me sauver la vie. En effet, à peine avions-nous mis les pieds à l'extérieur qu'une immense explosion se faisait sentir. Le siège du journal a été, en une fraction de seconde, rasé. J'avais laissé des collègues à l'intérieur de la salle de rédaction. Je les retrouvai, là, inanimés comme s'ils dormaient, sous un amas de gravats, de poutres et de poussière. Non ! Ils ne dormaient pas. Mohamed Dorbhane, un talentueux journaliste, père de quatre enfants, était mort sur le coup. Djamel Derraza, notre cruciverbiste, père de deux enfants, était déchiqueté. Allaoua Aït Mebarek, notre directeur de la rédaction, célibataire endurci, un artiste aimant la vie, était également mort. À l'extérieur, une trentaine de passants, des anonymes dont le tort avait été de se retrouver au mauvais endroit au mauvais moment, avaient tous perdu la vie. Un fourgon bourré de trois cents kilogrammes de TNT venait de souffler plusieurs immeubles. Alger vit son ciel s'assombrir. C'est au nom de l'islamisme que le ciel s'est assombri. Ce jour-là, je compris une chose fondamentale : il me faudrait absolument me battre contre cette idéologie fasciste et ceux qui la soutiennent, afin de ne plus avoir à quitter un lieu en espérant qu'aucune bombe n'explose.
Dans l'enquête publiée dans cet ouvrage, j'ai pris mes responsabilités. Si j'ai pris tant de risques et exposé ainsi les miens à des dangers certains et peut-être à des lendemains incertains, ce n'est certainement pas pour une quelconque recherche de célébrité. Ce n'est pas non plus par courage ou par héroïsme, c'est avant tout par conviction. Une conviction qui me revigore à chaque fois que je lis dans les colonnes d'une certaine presse ces horreurs qui dédouanent l'islamisme ou qui justifient le terrorisme, et à chaque fois que j'entends ces discours « droits-de-1'hommistes » indécents qui dénoncent presque la victime et compatissent avec le bourreau. C'est ce genre de comportements qui avait permis à Hitler de prendre d'abord le pouvoir, ensuite de déclencher la guerre et enfin d'exterminer des millions de juifs parce qu'ils étaient juifs.
Je refuse de laisser l'islamisme et ceux qui se reconnaissent en lui terroriser nos enfants et mettre en péril l'avenir de toutes les sociétés. C'est la raison pour laquelle, dès que j'ai eu l'occasion d'infiltrer un réseau islamiste, je l'ai fait afin de révéler le fonctionnement de ces structures dont les seuls desseins consistent à enflammer le monde et à terroriser les populations civiles. La France n'est pas exempte de ce danger. Pour preuve, durant plus de trois mois j'ai vécu parmi des hommes qui vouent une haine incommensurable à ce pays et qui n'hésiteront certainement pas, le moment venu, à provoquer des drames et des malheurs.
Le récit qui va suivre est, en quelque sorte, le journal que j'ai tenu pendant trois mois et dans lequel j'ai mentionné tout ce que j'ai vu, entendu et observé lors de mes contacts avec les islamistes, ceux-là mêmes que j'appellerai «mes frères». Ce témoignage servira, je l'espère, à une meilleure compréhension de l'islamisme et de son pendant, le terrorisme.