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Hebdomadaire « LExpress » du 2 octobre 2003
La lecture d'une sourate a ouvert la rencontre.
Pourtant, ce n'est pas un office religieux, mais une réunion politique qui a rassemblé, vendredi 12 septembre à Montpellier (Hérault), dans un appartement proche de l'hôtel du département, une quinzaine de néo-islamistes. Les uns venaient de Lyon, les autres de Toulouse, les autres étaient des Montpelliérains. Tous universitaires : étudiants en droit, en sciences politiques, en informatique, tous adeptes de Tariq Ramadan, l'habile penseur néofondamentaliste qui ébauche les voies et les moyens d'un islam européen. Parmi eux : une bonne moitié de Français de souche convertis.
Le petit groupe se réunissait pour organiser en mars prochain la défaite de Georges Frêche, maire socialiste de Montpellier, candidat à la présidence de la région Languedoc-Roussillon, actuellement aux mains de Jacques Blanc (UMP). Si le tonitruant homme politique est devenu la bête noire de ces jeunes musulmans, c'est parce qu'il s'est moqué des femmes en hidjab : elles sont ainsi vêtues, a-t-il dit, « pour se protéger des oreillons ». Frêche ne cache pas qu'il supporte mal la présence, dans ses cours à l'université, d'étudiantes voilées.
Il ne croit pas, clame-t-il, à l'intégration dans la République d'un islam qui « mélange la religion et la politique ».
Aux dernières élections législatives, les néo-islamistes du cru se sont démenés pour faire battre Frêche, alors député de la 2e circonscription de l'Hérault. Dans ce but, un petit groupe, le Comité de réflexion et d'innovation (CRI) s'est allié à l'adversaire UMP de Frêche, le Pr Jacques Domergue. Ses militants, dont des jeunes filles voilées, ont harcelé le candidat socialiste lors de chacune de ses réunions publiques, leurs proches battant campagne dans les quartiers maghrébins de la ZUP de la Paillade en faveur de Domergue. Frêche a été battu et, depuis, les néo-islamistes se targuent auprès de l'UMP de lui avoir donné « sa victoire la plus médiatique ».
Les néo-islamistes entendent, cette fois, faire coup double : d'une part, empêcher Frêche de prendre la région, d'autre part, faire mordre la poussière à trois de ses fidèles conseillers généraux dans des cantons montpelliérains à forte population musulmane :
André Vézinhet (9e canton), président de l'assemblée départementale, Monique Pétard (10e) et Christian Bouille (7e). L'argent ne manquera pas. Au cours de la réunion du 12 septembre, quatre enveloppes contenant en tout quelque 15 000 euros ont été remises aux responsables de campagne. Recommandation a été faite d'arrondir la cagnotte auprès de boutiques vendant des cartes pour téléphoner à l'étranger et d'épiceries de nuit. Une question cruciale a été tranchée : faut-il négocier auprès de l'UMP une contrepartie ? Le débat a été serré. A la majorité, la décision a été prise de ne rien demander à quiconque. Mieux vaut montrer d'abord sa force et parlementer ensuite. Les néo-islamistes savent être méthodiques. Jean-François Picard |