Le coran et l'islam, Etude historique et géo-politique > Succession
Une succession tumultueuse
La religion qui découle des pseudo révélations de Mahomet na instauré aucune « autorité suprême » (papes, évêques, conciles, )(28). A lexception de sa branche chiite (29), lislam na même pas de clergé structuré (30). Mais cela ne signifie pas, loin sen faut, que nous ayons affaire à une religion inorganisée. Bien au contraire, lislam en sidentifiant avec lomma (la communauté) a été à lorigine dune révolution qui a très largement dépassé le cadre de la vie religieuse. Elle fut aussi sociale, littéraire et politique. Le monothéisme islamique a imposé à ses adeptes des attitudes qui étaient de nature à provoquer de véritables « réactions en chaîne » dans tous les domaines de la vie. Ce fut le résultat de lapplication dune idéologie religieuse par un peuple (les bédouins dArabie) dont le tempérament et les coutumes expliquent la démarche. Le tempérament chicanier et belliqueux des nomades du désert eut aussi pour effet de générer de nombreux schismes au sein de lislam et ce, dès les premiers temps. Et ces dissidences tenaient bien plus à des considérations politiques quà des divergences religieuses. Elles débutèrent dès que la question de la succession de Mahomet vint à se poser, cest-à-dire juste après sa mort .
Dans un premier temps, on désigna le vieil Abou Bakr pour être le premier khalife. Il était lun des beaux-pères de Mahomet et lon savait quil nen avait plus pour longtemps à vivre. Il fut le seul, parmi les dix premiers khalifes, à mourir de mort naturelle. Il ne régna en effet sur lislam que deux courtes années et le problème de la succession nétait toujours pas réglé. Le rusé Omar lhomme de lombre qui avait si habilement manipulé Mahomet pendant de nombreuses années et qui avait présenté la candidature du faible Abou Bakr fit alors valoir ses droits au khalîfat.
Encore plus paradoxal que Mahomet, lancien esclave qui avait jadis été chargé de tuer le prophète était un monument de contradictions. Très violent et imbu de sa personnalité, il avait la « folie des grandeurs » mais aimait à afficher des goûts simples et des manières frugales. On trouvait déjà chez lui la préfiguration des qualités et des défauts des grands princes musulmans qui règneront sur lempire arabe. Ses colères étaient terribles et lon affirme quil avait battu à mort son propre fils quil accusait divrognerie et dimmoralité. Ce personnage ambigu fut assassiné par un esclave chrétien dorigine persane, en lan 644. Il navait régné sur lislam que pendant dix ans.
Pour lui succéder, le parti des Qoraïchites parvint à faire élire Othmân. Il était le neveu dAbou Sofiân, le plus implacable ennemi de Mahomet. Ce fut le début de la réaction espérée par les « Mounafikîn » (faux musulmans) qui, après avoir vainement tenté de détruire les effets des « révélations » de Mahomet, sefforcèrent den atténuer les effets subversifs.
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Carte de lexpansion arabo-musulmane, de lhégire
jusquà la chute des Ommayyades (622 à 750 de
notre ère).
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Carte de lexpansion de
lislam du XIe siècle au XIIIe siècle.
Le khalîfat dOthmân se caractérisa donc par une véritable chasse à lhomme qui visait les plus fidèles partisans de Mahomet, ceux que lon désignait sous le nom de « disciples du fils dAbdallah » afin de ne pas prononcer « Mahomet », le nom détesté. Après les bains de sang ordonnés par le « prophète », vinrent les bains de sang ordonnés par ses successeurs. Cest sous le khâlifat dOthmân que fut publiée la première édition du coran dit « officiel », une édition « épurée » et pour le moins curieuse (voir l'étude analytique) qui a subsisté jusquà nos jours. Ce khalîfe très peu « orthodoxe » fit adapter le coran à sa politique. Cest pour cette raison quil fit disparaître toutes les autres versions du « livre révélé ». Mais, curieusement, cest lédition supervisée par Othmân qui est devenue la version officielle et orthodoxe. Ce nest pas là le moindre paradoxe de lislam.
Les évènements se précipitèrent encore lorsquAli, gendre de Mahomet, eut succédé à Othmân, ce dernier ayant été tué lors dune révolte. Cétait en lan 656 et les « légitimistes » pavoisaient de nouveau. Le mari de Fatima allait assumer une fonction qui, selon eux, avait été usurpée jusque là. Mais Ali ne faisait pas lunanimité chez les adeptes de la nouvelle religion. Déjà en 644, quand une « commission » de six sages avait été chargée de pourvoir au remplacement dOmar, Ali avait été écarté au bénéfice dOthmân. Selon ses adversaires, il représentait trop bien la tradition primitive de lislam, laquelle était devenue incompatible avec la direction du nouvel empire arabe qui sétait constitué depuis la mort de Mahomet. Tout porte cependant à croire que cette opposition tenait bien plus à la volonté de préserver des privilèges acquis, des privilèges quAli aurait pu compromettre. Car il était connu pour être proche des préoccupations des opprimés. Son principal rival fut Moâwiya, cousin dOthmân et gouverneur de la Syrie .
Ce fut le début de laffrontement des deux branches issues de la parenté de Mahomet, celle des Hachimites (branche dite « aînée ») et celle des Omayyades (branche cadette).
Les Ommayyades détenaient cependant la puissance effective dans le nouvel empire. Cest dans la province syrienne, dirigée par Moâwiyaj, quétaient concentrées les troupes musulmanes qui devaient sélancer vers de nouvelles conquêtes et notamment vers les territoires sous contrôle byzantin. A Damas, un « esprit nouveau » commençait à saffirmer chez les musulmans. Ils y avaient adopté les habitudes syriennes, notamment la consommation de vin et certains rites païens. Les anciens adversaires de lislam avaient trouvé refuge dans ce pays et ils pouvaient y narguer les « docteurs de la foi » en toute impunité. Il nétait plus du tout au goût du jour de regarder les « compagnons du prophète » comme des être intouchables, presque sacrés.
Ali tenta dans un premier temps de sauver la face. Il triompha dabord de Thalha et de Az-Zobaïr et ce, malgré quAïcha, la jeune veuve de Mahomet (elle n'avait que six ans lors de son mariage avec le prophète...), se soit ralliée à leur cause. Quant à Moâwiya, il fut plus malin et proposa à Ali de se soumettre à larbitrage dOdroh puis de renoncer lui-même à ses droits. Le khalife en titre, fut ainsi à lorigine de la défection du clan des « Khâridjites » (« sortants ») et de lindignation de ses fidèles. Nombreux furent ceux qui refusèrent daccepter sa démission : ils formeront le clan des Chiites et sobstineront à voir en Ali le plus saint des hommes et le seul successeur légitime du prophète. Et lorsquil fut égorgé (par les Khâridjites si lon en croit les Chiites), il sera élevé au rang de « martyr par excellence » du monde islamique.
Le guerre des clans était à son paroxysme. Les Qoraïchites firent assassiner les fils dAli, Hossein et Hassan, que Mahomet avait tenus sur ses genoux. On alla même jusquà faire égorger Ibn Zahir - le premier né des Mohâdjirin et lon assiégea les fidèles réfugiés dans le temple de la Kaba où ils persistaient à vivre selon les préceptes du coran originel. Des machines de guerre furent utilisées pour pratiquer une brèche dans le sanctuaire. Ce qui fera écrire à Renan que : « ce fut un étrange scandale que ce dernier siège de la Mekke où lon vit les musulmans de Syrie mettre le feu aux voiles de la Kaba et la faire crouler sous les pierres des balistes ».
Lislam primitif se termina donc par une guerre fratricide généralisée et par la mort du quatrième Khalife, le troisième a avoir été assassiné. Lislam dit « légaliste » venait de voir le jour avec la victoire de Moâwiya. Jamais une religion navait vu le jour dans un tel climat de haine, dans un tel bain de sang ! Où est donc cet « islam pacifique » dont on nous rabat les oreilles depuis quelques temps ? Où est le fameux « âge dor » des musulmans ?
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