Mahomet

Source : http://gallica.bnf.fr/Catalogue/noticesInd/FRBNF37235326.htm

Définition extraite du Nouveau dictionnaire universel, tome second, par Maurice Lachatre

Editeur : Docks de la librairie, 1870, Paris

Pages 561-562

Début de la définition extraite du Nouveau dictionnaire universel, tome second, par Maurice Lachatre, 1870MAHOMET OU MOHAMMED, d'Après l'orthographe et la prononciation arabes. Né à La Mecque, le 10 novembre 570, d'Abdallah et d'Êminah, fondateur de l'islamisme. De tous les noms de l'histoire qui éveillent la sympathie, provoquent la curiosité et imposent leur souvenir aux générations, le nom de Mahomet doit être placé au premier rang. Comme le fait observer Edg. Quinet, « Moîse, Jésus, Mahomet, sont de la même famille. » Et ce qui le prouverait, entre mille choses, c'est cette triple révélation de l'unité pure de Dieu qui éclate dans le même lieu, dans le même désert d'Arabie ou de Syrie. Le Dieu de Mahomet est, dans son principe, le dieu de Moîse; Jéhovah et Allah sont une seule et même divinité dans une double incarnation, et avec les modifications naturelles, commandées par le temps et les mœurs. Ce n'est donc point un homme vulgaire, un intrigant de bas étage, comme l'ont dépeint les catholiques, que cet obscur chamelier du désert qui conquiert, à force de soins, d'études et de génie, l'obéissance à ses lois de toute une génération ; qui fonde, à force de volonté et d'audace, une religion nouvelle qui s'étend depuis le détroit de Gibraltar jusqu'aux Indes. Qu'il ait tiré parti de l'ignorante crédulité et de la superstition populaire, cela est incontestable. Moïse, Jésus-Christ et d'autres l'avaient fait avant lui. D'ailleurs, cette crédulité ignorante, instrument admirablement manié par Mahomet, était étayée de l'état des idées à cette époque. Les nations avaient accepté sans examen le joug de l'Eglise catholique; le paganisme avait disparu. Mais au moment où, les dogmes paraissant achevés, le mouvement des esprits fit une halte, la moitié du monde divorça avec le catholicisme. Les idées que l'on allait condamner comme mortes, sons le nom d'hérésies, se dressèrent tout à coup dans la chrétienté, et, au grand ébahissement de l'Occident, une religion rivale se leva en Orient; le mahométisme se forma. Le jour même où l'esprit, en Occident, voulut se reposer dans le passé, sans y rien ajouter, l'islamisme apparut; on avait mis le sceau sur les Écritures, en déclarant qu'aucune puissance ne les augmenterait d'une ligne; pour toute réponse, une race d'hommes cherche un nouveau livre, et trouve le Coran. Voilà ce qui fit la puissance d'attraction et ce qui donne la raison de la domination de Mahomet sur les esprits déjà si fanatisables de l'Orient. Isolé, sous un autre ciel, avec d'autres mœurs, à une autre époque, il eût été seulement un grand guerrier peut-être, un homme remarquable a coup sûr. Aidé par les circonstances, par les dispositions des esprits, par les influences du climat, par sa poésie personnelle et par la connaissance parfaite qu'il avait de la poésie de l'Orient et des orientaux, il s'élève, il grandit, il s'impose, il forme un code, un Évangile, des lois, il existe enfin comme représentant du dieu qu'il révèle. « Lorsqu'on pense qu'au temps de Mahomet, l'Asie occidentale, déjà éprouvée par le christianisme, rejetait d'elle-même ses anciennes croyances, que le sentiment de l'unité de Dieu rentrait de toutes parts dans le monde, que c'était là le cri des choses, il n'est certes pas impossible que Mahomet, saisi, obsédé plus que personne par cet instinct, ait cru sincèrement être l'écho de cette parole inarticulée, qui était au fond de tous les événements et de toute l'histoire contemporaine. Ce n'est qu'un poète, disaient les tribus incrédules, et elles ne se trompaient pas; seulement, la poésie était pour lui la vérité même. Il ne composait pas arbitrairement ses rapsodies sacrées, comme Homère; il était bien plutôt de la famille de ces rapsodes orientaux, indous, de Valmiki, par exemple, qui écrivaient leurs épopées sous la dictée immédiate de Dieu. Il faut un instinct de vérité, un levier de sincérité a l'homme, même pour déplacer un ver de terre; qu'est-ce donc pour remuer un monde !... Mais, ce monde, ce ne fut pas tout d'un coup que Mahomet le remua. Sa révélation fut lente à se produire, son influence lente à se manifester. Ce ne fut qu'à l'âge de quarante ans qu'il se donna comme prophète; que, pour arriver plus sûrement au but qu'il voulait atteindre, il parla en inspiré et fit des miracles tout comme un autre. Comme un autre aussi, il eut à subir des persécutions. Il fut contraint de quitter le lieu de sa naissance pour aller à Médine. Cette retraite fut l'époque réelle de sa gloire, de la fondation de son empire et de sa religion; c'est ce que l'on nomma hégire, c. à. d. fuite ou persécution, dont le premier jour correspond au 18 juillet de l'an 622 de J. C. Le prophète fugitif devint conquérant. Il leva des troupes et livra des batailles. La victoire qu'il remporta en 627 fut suivie d'un traité qui lui donna un libre accès à La Mecque, ce fut la ville qu'il choisit pour le lieu où ses disciples et ses croyants feraient dans la suite leur pèlerinage. Maître de l'Arabie et redoutable à tous ses voisins, Mahomet voulut étendre ses conquêtes et sa religion chez les Perses et les Grecs. Il commença par la Syrie, soumise alors à Héraclius, à qui il prit quelques villes, et rendit tributaires les princes de Dauma et de Deyla. Ce fut par ces exploits qu'il termina toutes les guerres ou il avait commandé en personne et « où il avait montré l'intrépidité d'Alexandre, » avouent ses biographes haineux. Ses généraux, aussi heureux que lui, accrurent encore ses conquêtes et lui soumirent tout le pays à 1,600 kilom. de Médine, tant au levant qu'au midi. L'Arabie presque tout entière lui appartenait; une moitié du monde allait bientôt appartenir à la religion fondée par lui. Comme les hommes, dont la destinée a été extraordinaire, Mahomet eut une fin sombre et presque mystérieuse. Une première fois conndamné à mort par les cheiks des Koreischites, comme le Christ par Pilate, il échappa au supplice. Mais il ne pouvait pas échapper à la haine, et, a quelques années de ses victoires en Syrie, il mourut des suites d'un poison qu'une femme lui avait donné pour éprouver sa divinité. C'était dans la 62e année de son âge, la 11e de l'hégire, et la 632e de J. C. On a cru longtemps que son tombeau était suspendu dans la kabda. Il se voit encore à l'un des angles de la grande mosquée de Médine. » (Edgar Quinet.)

Consulter d'autres biographies de Mahomet.