Le système constitutionnel de l'Arabie Saoudite
Source : http://www.chez.com/constit/arab.html
698. L'Arabie Saoudite (ou Séoudite) est née du mouvement islamique
wahhabite, qui à partir de 1750 sous la direction du bédouin hanbalite Muhammad
ibn Abd al-Wahhâb (v. 1720-1792) lutte pour imposer aux musulmans sa conception
rigoriste de la religion, notamment inspirée de la théologie intégriste de
l'Ouléma ibn Taïmiyya (1263-1328). Chassé de sa tribu bédouine, ibn-Abd
el-Wahhab se réfugie auprès du roi Mohammed Ibn Séoud, qui règne alors sur une
oasis du Nedjd. Les responsables spirituels wahhabites aident les Séoud à
étendre leur pouvoir temporel : Koweït est pris en 1788, Kerbela la ville sainte
des shi'ites est prise en 1801, La Mecque en 1804, Djeddah et Médine en 1806.
Les Turcs et les Egyptiens réduisent leur puissance jusqu'en 1902. Dans la
première partie du XXème siècle, aider par les britanniques à partir de 1915,
Abd el-Aziz III ibn Séoud (1880-1953) prend, avec ses guerriers wahhabites
ikhwan, le contrôle de la majeure partie de la péninsule arabique, avec La Mecque (1924), Djeddah et Médine (1925), et se fait proclamer roi de l'Arabie
Séoudite en 1932. Grâce à l'exploitation des richesses pétrolières,
entreprise avec les compagnies américaines, les souverains séoudiens et les
Princes de leurs tribus réunissent après la deuxième guerre mondiale une fortune
conséquente, placée, notamment, dans les pays occidentaux, et financent les
mouvements islamiques intégristes dans les Etats musulmans modernes et les Etats
occidentaux connaissant des minorités musulmanes, se rendant ainsi
financièrement et idéologiquement, donc politiquement, puissants. Le Koweït,
placé sous protectorat britannique en 1899, doit lutter contre l'expansionnisme
Séoudien en 1920 et perd au profit de l'Arabie Saoudite une grande partie de son
territoire. A partir de 1946 l'exploitation pétrolière avec les compagnies
britannique et américaine (British Petroleum et Gulf Oil) permet à la famille
Sabah de la tribu Utub, installée au pouvoir depuis le milieu du XVIIIème
siècle, et aux huit principales familles de marchands, de se constituer
d’aimables réserves financières, qui sont placées en Occident. Indépendant en
1961 le Koweït est immédiatement revendiqué par l'Irak du général Abd al-Karim
Kassem qui fait une tentative d'annexion qui est alors repoussée par les
britanniques et la Ligue arabe. Comme l’on sait une nouvelle tentative sera
faite par Saddam Hussein le 2 août 1990 qui sera immédiatement contrée par les
Etats-Unis très soucieux de défendre l’indépendance de leurs alliés arabes
(guerre du golfe). L'Arabie Saoudite est une monarchie absolue de type
tribal, une théocratie islamique.
699. C'est le système de transmission et d'exercice du Pouvoir politique qui
est le plus proche du système des origines de l'Islam, à l'époque de Muhammad
(Mahomet) et des Califes dans les premiers siècles de l'ère musulmane jusqu'à la
domination turque. Le tribalisme dynastique de l'Arabie Saoudite est
caractérisé par certains éléments (Maurice Flory et autres, Les Régimes
politiques arabes, PUF, Paris, 1991) : le Pouvoir politique est exercé par une
puissante famille royale sur le modèle de la tradition tribale ; le contrôle de
la famille régnante est total ; la famille règnante pratique l'institution
tribale du Majlis ash-Shura, qui consiste en l'existence d'assemblées tribales
consultatives permettant au peuple, au sein des tribus, de demander, par la voie
hiérarchique, aide et assistance, la décision étant toujours prise par le
monarque ; le pouvoir exercé est de type patriarcal, la confusion est totale
entre le public et le privé, l'autorité patriarcale est dans l'ordre naturel des
choses ; la légitimation du Pouvoir est fondé sur la tradition dynastique qui
affirme que le monarque est un descendant de Mohammed (Mahomet) et l'Islam hanbalite
wahhabite, particulièrement rigoureux ; le droit islamique hanbalite wahhabite
est le droit positif ; la modernisation ne peut être qu'économique.
700. En Arabie Saoudite la Constitution est le Coran et la Sounnah (coutume
du Prophète), appliquée selon la coutume bédouine islamique hanbalite wahhabite,
qui instaure une confusion des pouvoirs avec une organisation administrative
déconcentrée. Le décret royal du 1er mars 1992 qui promulgue la Loi fondamentale
du pouvoir ne fait que le constater, même si la création le même jour d’un
Conseil consultatif est pour certains commentateurs un premier pas vers une
évolution de la monarchie absolue.
§ 1. La confusion des pouvoirs
701. Le Roi détient tous les pouvoirs : idéologique et politique ;
"législatif", "exécutif" et judiciaire. Mais le Roi doit respecter les coutumes
tribales et les règles religieuses. Le Roi est le Chef religieux en tant
qu'Imâm (successeur de Mohammed [Mahomet]) de l'Islam hanbalite wahhabite et le Chef du
pouvoir politique et de l'armée (Cheikh al Machayyikh). Il intervient par
décret royal (car seul Allah a le pouvoir de légiférer), les questions mineures
étant déléguées au gouvernement. Cependant le grand mouftî et les autres
mouftî, qui sont les interprètes-consultants de la religion d'Etat, peuvent
imposer le respect de certaines règles islamiques et certaines familles
aristocratiques (comme les Jelawis) ont une grande influence politique. Le
Roi consulte (Ahl Al'aqdwalhal) la famille royale, les Oulémas (Docteurs de la
Loi) et les princes tribaux (Umaras) ainsi que le Conseil des notables nommé par
lui (Diwan). Le Roi détient le pouvoir judiciaire dont l'organisation à
trois niveaux est supervisée par une Commission judiciaire : au sommet de la
hiérarchie se situent la Cour d'Appel et les Cours de Cassation, au niveau
intermédiaire les Makhama Al, Shari'a Al et Koubra, au niveau inférieur les
Makhama Al, Omor Al et Moustajalah.
§ 2. L'organisation administrative
702. Le Roi nomme, pour une durée de quatre ans sauf exceptions (Loi
fondamentale de 1992), les membres du Cabinet, le Premier ministre (le Prince
héritier) et les ministres. Il nomme les Hauts fonctionnaires civils et
militaires. Les Forces armées, la Garde nationale, l'administration
provinciale, les Tribus dirigées par les Princes (Umaras) et Cheikhs avec les
Conseils tribaux (Majlis), sont directement rattachées au Cabinet. Les
provinces sont dirigées par un Gouverneur général qui est assisté d'un Conseil
consultatif (1992) provincial. Les provinces sont subdivisées en disticts,
chaque district étant dirigé par un Gouverneur assisté d'un Conseil de district.
Les districts sont subdivisés en municipalités, chaque municipalité étant
dirigée par un Chef administratif assisté par un Conseil municipal. Les
réclamations administratives peuvent être portées devant un Bureau des
réclamations.
§ 3. Le Conseil consultatif
703. Après la guerre du golfe, et sur les conseils amicaux des Etats-Unis, le
roi Fahd d’Arabie saoudite a décidé de créer un Conseil consultatif (Majlis
al-Choura) composé de soixante et un membres nommés par lui pour une durée de
quatre ans (décret royal du 1er mars 1992 pour la création, d’août 1993 pour la
composition, l’installation étant faite le 28 décembre 1993 ). Le Conseil
donne au Premier ministre son avis sur les sujets qui lui sont soumis par
celui-ci, c’est à dire par le Roi. Le Premier ministre doit consulter le Conseil
pour tout projet de loi, de réglement, de traité, notamment, les divergences
sont régler par le Roi. Et dix des membres du Conseil peuvent proposer un projet
de loi au Cabinet qui doit obligatoirement l’approuver pour que la procédure
puisse se poursuivre.
704. L'Arabie Saoudite fait une application intégrale de la Charî'ah, la Loi
révélée par Allah à Muhammad (ou Mohammed) [Mahomet] telle qu'elle résulte du Coran
(al-Qur'ân, lecture) et de la Sounnah (coutume du Prophète), qui concerne non
seulement le Droit au sens occidental du terme mais aussi les devoirs religieux,
le premier étant le combat (djihad) que le musulman doit mener pour le triomphe
universel de sa foi.
705. Le Coran (al-Qur’ân, message), c'est la Loi divine, révélée par Allah
(par l'intermédiaire de l'archange Gabriel, Jibril - la puissance de Dieu) au
prophète Muhammad [Mahomet] (v.570-632) selon le dogme musulman. Mahomet étant
analphabète communiqua, ou dicta, au fur et à mesure, ses "Révélations", sans
qu'une récension systématique des textes soit effectuée de son vivant. C'est
seulement une vingtaine d'années après sa mort, selon un point de vue
généralement admis, que le troisième Calife Othman, qui régna de 644 à 656,
fit procéder, sous la direction de l'ancien secrétaire de Mohammed (Mahomet), à la
rédaction officielle du texte, ordonnant en même temps la destruction de tous
les documents fragmentaires existants, ce qui permit d'éliminer certains
passages tenus pour abrogés. La conformité du texte officiel avec la
"Révélation" est un dogme pour les musulmans sunnites mais pas pour les
chi'ites, notamment. Car Othman, gendre du Prophète, fut choisi contre un autre
gendre, Ali, pour régner en 644. Après l'assassinat d'Othman en 656, Ali prend
le pouvoir, ce qui déclenche une guerre civile et fut à l'origine du "chi'isme"
des arabes les plus intransigeants, qui deviendra l'Islam chi'ite, actuelle
religion d'Etat de l'Iran. Le Coran est constitué de 6232 versets regroupés
en 114 sourates, la plus petite étant constituée de 2 versets (sourate CX) et la
plus grande de 288 (sourate II). Les sourates sont rangées non pas dans l'ordre
chronologique de leur "révélation" mais par ordre de longueur décroissante (sauf
exceptions). Seul environ un dixième du texte contient l'énoncé de règles de
conduite dont une partie seulement est juridique : selon certains docteurs 288
versets formuleraient une règle juridique et selon certains autres 80 seulement.
Les deux domaines les plus développés concernent le droit de la famille et
le droit pénal.
A/ Le droit de la famille
706. Le Coran pose le principe général de la supériorité de l'homme sur la
femme (IV, 38 ; II, 228), comme la Bible (Genèse, III, 16). Il autorise la
polygamie mais limitée à quatre épouses (IV, 3) avec toutefois le droit de
concubinage du maître sur ses esclaves (IV, 29) ; l'émancipation progressive des
esclaves étant recommandée (IX, 60 ; XXIV, 33) et les esclaves mâles ayant une
capacité juridique réduite de moitié - comme celle des femmes libres sauf
exceptions (ils peuvent épouser deux femmes et ne reçoivent comme sanction, par
exemple, que 40 coups de fouet au lieu de 80). (Le mariage temporaire n'est
pas admis chez les sunnites mais il est légal chez les chi'ites "... on indique,
par exemple, qu'il s'agit d'une période d'une heure, d'un jour, d'un mois, d'un
an ou plus." Principes Philosophiques, Sociaux et Religieux, de l'Ayatollah
Khomeyni, Editions Libres- Hallier, Paris, 1979, p. 121, I.) L'autorité du
mari est très fermement garantie (IV, 38, "Les hommes sont des directeurs pour
les femmes... Et quant à celles dont vous craignez l'infidélité, exhortez-les,
abandonnez-les dans leurs lits, et battez-les.") mais la femme mariée est
indépendante quant à son patrimoine, séparé de celui du mari, qu'elle administre
librement. Elle n'est pas obligée de subvenir sur son patrimoine à ses besoins
personnels ni aux besoins de ses enfants. Elle peut ester en justice sans
l'autorisation du mari. Selon certaines conditions de forme (les deux
premières répudiations sont révocables, la troisième est définitive) le mari a
le droit discrétionnaire de répudiation (talâq) à l'égard de ses femmes (II, 226
et sv. ; LXV) ; toutefois le divorce contre la volonté du mari est possible
(Khoul') à condition que les femmes rachètent leur liberté (II, 229 ; IV, 127).
Le Coran est très précis pour tout ce qui touche au droit successoral
(notamment IV, 2 et sv., 175).
B/ Le droit pénal
707. Les dispositions du Coran sont relativement nombreuses et précises.
Le principe général en matière de meurtre est l'application de la loi
judaïque de la Bible (Exode, XXI, 23, 24, 25) du talion (vengeance privée
limitée - oeil pour oeil, dent pour dent, pied pour pied) (II, 173 ; XVII, 35)
mais il est conseillé de pardonner contre paiement du prix du sang (dîyah) (II,
173). (Par contre, et en principe, le Christianisme recommande le pardon des
offenses et l'amour non seulement du prochain mais aussi des ennemis - Matthieu,
V, 38, 39 et sv..). Le vol est sanctionné par l'amputation de la main du
voleur (V, 42), la fornication (relations sexuelles entre personnes non-mariées)
par la flagellation (100 coups de fouet) (XXIV, 2), ainsi d'ailleurs que la
dénonciation calomnieuse (80 coups de fouets) (XXIV, 4), l'homosexualité est
fermement condamnée sans peine explicite (VII, 78, 79 ; XXVII, 54, 55) (mais sanctionnée de la
peine de mort par extension de la sanction frappant le crime d'adultère).
Le vin (par extension pour les wahhabites toutes les boissons alcoolisées)
(dans la Bible, Juges, XIII, 4, 14) et les jeux de hasard (ordure, oeuvre du
Diable, V. 92, 93) sont interdits ainsi que l'usure (II, 276). Les
dispositions du Coran n'étant pas toujours très claires et pouvant être
contradictoires son commentaire (tafsîr) permet de préciser le sens de certains
versets. Le commentaire le plus important est celui de ibn Jarîr al-Tabarî
(v.838-923). Le tafsîr permet encore de dégager le principe (açl - racine) de
certaines dispositions pour en déduire ensuite des conséquences adaptées.
§ 2. La Sounnah (sunna)
708. Les premiers jurisconsultes musulmans ont été amenés à chercher en
dehors du Coran lui-même des réponses juridiques précises aux nombreuses
questions que celui-ci laissait sans réponse. Ainsi, très rapidement, les
réponses ont-elles été cherchées dans la vie exemplaire du Prophète - qui est
l'exemple que le Croyant doit suivre. La Sounnah (la coutume du Prophète)
est l'ensemble des hadîth, les récits relatifs aux paroles ou aux silences, aux
actions ou non-actions de Muhammad (Mahomet), et parfois de ses compagnons, transmis
oralement par les témoins, sur plusieurs générations .... Les premières
collections systématiques ont été faites à partir de l'an 720 après J.C.. Le
nombre des hadîth atteignant plusieurs centaines de milliers (600 000 pour
certains, 750 000, pour d'autres, un million pour les plus généreux) la critique
des hadîth (moustâlah l-hadîth) permit de les classer en parfaits (çahîh), bons
(hassan), douteux (da'îf). Pour les sunnites (six recueils pour l'ensemble des
hadîth) les hadîth parfaits ont été notamment recueillis par al-Boukhârî
(810-870) (2762 hadîth différents). Pour les chi'ites l'un des quatre recueils
retenus est celui du cheikh al Koulaynî, décédé en 939 après Jésus-Christ.
La coutume du Prophète est donc la codification de la coutume des bédouins
et caravaniers arabes du Hedjaz à l'époque de Mahomet et dans les trois siècles
qui suivirent, éventuellement modifiée par le Prophète lui-même. C'est cette
coutume, dont le respect pour les wahhabites est de nature dogmatique pour ce
qui est de la lecture spécifique qu'ils en font, qui permet de compléter le Coran : par exemple l'amputation de la main du voleur n'est plus systématique
mais s'applique au vol qui dépasse une certaine valeur. Mais les hadîth portant
des règles juridiques plus nombreuses et plus précises que celles du Coran, de
nombreuses règles sont nouvelles par rapport à celui-ci, qui peuvent relever
d'une application extensive : par exemple le hadîth "Mariez vos enfants quand
ils sont jeunes" valide le droit absolu du père ou de son représentant de marier
ses enfants mineurs dès leur naissance.
709. Le djihâd pour les occidentaux c’est la guerre sainte alors que cet
aspect du concept n’est que l’un des trois aspects du djihâd qui est majeur,
mineur interne et mineur externe.
A/ Le djihâd majeur ou grand djihâd
710. Le djihâd majeur est l’effort que doit faire tout musulman pour lutter
contre lui-même, contre son égoïsme et ses instincts, contre son orgueil et sa
passion de dominer les autres. Le grand djhâd est la lutte intérieure que le
musulman mène contre l’envie et la jalousie, les idoles que sont le pouvoir, la
richesse, le faux savoir qui l’écartent du chemin de Dieu.
B/ Le djihâd mineur interne ou petit djihâd interne
711. Le djihâd mineur interne est l’effort que doit faire tout musulman pour
maintenir la cohésion de la communauté des croyants, son unité. Il s’agit donc
du combat que le bon musulman doit livrer contre les ennemis internes que sont
les shismatiques, les hérétiques, les renégats et les apostats. La guerre civile
est ainsi justifiée qui permet de soumettre par la force les minorités rebelles
qui refusent la loi islamique. Est également ainsi justifié l’attentat politique
contre des dirigeants qui ne respecteraient pas les obligations de la religion.
L’Ayatollah Ruhollâh Mussavi Khomeyni (1912-1989), fondateur de la
République islamique iranienne en 1979, Imam de l’Islam shi’ite iranien, est
très clair à ce sujet qui nous dit que « La foi et la justice islamique exigent
de ne pas laisser survivre, dans le monde musulman, les gouvernements
anti-islamiques ou ceux qui ne se conforment pas entièrement aux lois islamiques
». Pour lui tout pouvoir laïque est un pouvoir satanique, « le mal suprême qui
doit être impitoyablement combattu et déraciné ... c’est non seulement notre
devoir en Iran, mais c’est aussi le devoir de tous les musulmans du monde, dans
tous les pays musulmans, de mener la Révolution Politique Islamique à la
victoire finale (Principes politiques, philosophiques, sociaux et religieux de
l’Ayatollah Khomeyni, Ed. Libres-Hallier, Paris, 1979, pp. 26-27).
C/ Le djihâd mineur externe ou petit djihâd externe, c’est à dire la guerre
sainte
712. La guerre sainte est soit défensive soit offensive. Le devoir du bon
musulman est de lutter pour le triomphe universel de sa religion. Par exemple,
pour l’Ayatollah Khomeyni : « La guerre sainte signifie la conquête des
territoires non musulmans. Il se peut qu’elle soit déclarée après la formation
d’un gouvernement islamique digne de ce nom, sous la direction de l’Imam ou sur
son ordre. Il sera alors du devoir de tout homme majeur et valide de se porter
volontaire dans cette guerre de conquête dont le but final est de faire régner
la loi coranique d’un bout à l’autre de la Terre... L’Europe (l’Occident) n’est
qu’un ensemble de dictatures pleines d’injustices ; l’humanité entière doit
frapper d’une poigne de fer ces fauteurs de troubles si elle veut retrouver sa
tranquillité. Si la civilisation islamique avait dirigé l’Occident, on ne serait
plus contraint d’assister à ces agissements sauvages indignes même des animaux
féroces (idem, p. 23). Le Coran indique qui doit combattre et de quelle
manière. Lutter pour le triomphe universel de l’Islam est un devoir pour tous les
musulmans mais si les volontaires, les mudjahidin, les combattants dans le
chemin (voie) de Dieu, sont suffisamment nombreux il y a dispense pour les
autres. Selon le Coran la supériorité du croyant sur l’infidèle est
évidente, ce qui signifie que si le croyant est vaincu c’est que Dieu le veut,
qui récompense le combattant tué, un martyre, par les bienfaits du Paradis.
La guerre elle-même est réglementée : il faut avertir l’infidèle avant de
l’attaquer, afin qu’il puisse accepter la conversion. S’il refuse, le combat est
une nécessité car l’essence de l’homme raisonnable est d’être musulman. S’il
s’est égaré dans une autre religion ou dans l’athéisme il faut le rappeler à la
raison, qui est d’être muslim, c’est à dire soumis à Dieu. Il est vrai que
Muhammad (Mahomet) lui-même a attaqué par surprise la tribu des Banu Mustalique, qu’il a
vaincue, ce qui lui a permis de prendre pour femme la fille du chef... et qu’en
conséquence certains commentateurs pensent que l’attaque par surprise est
autorisée. Les vainqueurs se partagent le butin, qui comprend les femmes et
les enfants qui sont réduits en esclavage ainsi que les hommes qui peuvent être
utiles, à condition qu’il y ait conversion, car le génocide des vaincus ne doit
jamais être l’objectif de la guerre sainte ...
§ 4. Les grandes écoles juridiques
713. Le droit musulman applicable peut varier très largement selon que les
croyants se rattachent à l'une ou l'autre des écoles juridiques de la oumma (la
communauté des croyants). Il faut distinguer les écoles sunnites, très
largement majoritaires (90%), des autres écoles kharidjite et chi'ites.
L'école des kharidjites (sortants - premiers dissidents de l'Islam en 658)
ibâdites subsiste à Djerba en Tunisie, au Djebel-Nefousa en Libye, au Mzab en
Algérie. Les kharidjites, "puritains de l'Islam", furent particulièrement
intransigeants et violents. Les écoles chi'ites (chîat - le parti d'Ali, le
gendre assassiné du Prophète en 661) sont : - imamites (Iran, partie de
l'Iraq) ; le chi'isme imamite est la religion officielle de la Perse/Iran depuis
1501 ; son rigorisme doctrinal est connu ; - ismaéliennes (par exemple les
nosaïris alaouites de Syrie - actuellement au Pouvoir avec Haffez el-Assad, les
nizarites khodjas de l'Aga Khan en Inde, en Afrique orientale et du sud, à
Ceylan et en Birmanie - qui sont les descendants de la secte des hachîchiyyîn
(assassins - fumeurs de haschisch), les druzes en Syrie et au Liban) ; -
zaydites (les zaydites qui ont fondés un Etat au Yémen en 898 y sont toujours
majoritaires). Les quatre grandes écoles sunnites sont les suivantes : -
l'école hanéfite, fondée par l'imâm Aboû Hanîfah (v.696-767) en Iraq, fut
surtout répandue par les Turcs et est implantée en Turquie, en Afghanistan, au Pakistan,
en Inde et en Chine ; en principe elle accepte en dehors du Coran et de la
Sounnah les règles de droit issues de l'effort de recherche personnelle
(ijtihad), du raisonnement personnel (râï) et de la recherche de l'équité
(istihsân) ; - l'école malékite, fondée par l'imâm Mâlik ibn Annas
(710-795), implantée en Haute Egypte, au Soudan, au Maghreb, en Afrique
occidentale ; elle fait confiance aux Docteurs de la Loi (ijma'- consensus des
savants) et accorde une grande importance aux coutumes locales ; - l'école
shafi'ite, fondée par l'imâm al-Shafi'i (767-820), implantée en Basse-Egypte, en
Arabie du Sud (Hedjaz), en Afrique orientale, en Malaisie, en Indonésie, en
Inde, en Thaïlande, au Vietnam, aux Philippines ; elle accepte les règles
juridiques issues de l'ijma' - mais le consensus doit être celui de l'ensemble
de la communauté, et l'analogie (qîyâs) ; elle rejette le raisonnement personnel
; - l'école hanbalite fondée par l'Imam ibn Hanbal (780-855), religion
d'Etat sous sa forme wahhabite en Arabie Saoudite, est la plus intégriste ; elle
rejette systématiquement le recours à la raison pour n'accepter comme valides
que le Coran et la Sounnah.
Remarques
714. Le système constitutionnel Saoudien pose un problème juridique, celui de
sa validité par rapport au droit international. Le droit international pose
comme principe fondamental, applicable à tous les Etats et en particulier aux
Etats membres de l'ONU, le principe du respect des Droits fondamentaux de la
personne humaine sans discrimination de quelle sorte que ce soit. Or
certaines règles du droit islamique, tel qu'il est appliqué notamment par l'Arabie
Saoudite, semblent bien en contradiction avec ce principe. Le principe de
l'égalité juridique (par exemple de non-discrimination entre
les sexes, de non-discrimination
religieuse ou philosophique), la liberté d'opinion et de manifestation des
opinions, notamment, ne sont pas respectées. C’est pourquoi l'Organisation des
Nations Unies, et plus particulièrement ses membres permanents - donc les
Etats-unis d'Amérique (plaisanterie ??), se doivent évidemment d’aider à
accélérer l’évolution démocratique qui a été amorcée récemment. Certains
musulmans, peut-être bien intégristes, font cependant remarquer que la Charî'a,
même intégralement appliquée, est un incontestable progrès de civilisation par
rapport aux moeurs tribales des arabes polythéistes d'avant le VIIème siècle,
qui pratiquaient très volontiers la rapine et le meurtre (le droit islamique
applique la peine légale (hadd) de la crucifixion au crime de brigandage (qat'al
tarîq, coupure des chemins), et considéraient les femmes, notamment, comme des
objets marchands de plaisir et des moyens de production et de reproduction ...
Mais peut-être serait-il possible, sans sacrilège, évidemment, de passer du
VIIème au XVIIIème siècle ... ? (Note du webmaster : éventuellement, on pourrait aussi envisager de passer au XXIème siècle !)
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